jeudi 23 novembre 2006

L'EDIT ROYAL TOLDOTH



RÉSUMÉ DU DISCOURS DU RABBI MHM CHLITA
LE MARDI SOIR (28 MAR ‘HECHVAN), JEUDI SOIR (1er JOUR DE ROCH ‘HODECH KISLEV)
ET CHABBAT (2 KISLEV) - PARACHAT TOLDOTH 5752 (1991)

La signification de « Roch ‘Hodech »

« Roch ‘Hodech », (la « tête du mois », appellation du premier jour du mois) ne représente pas seulement le début d’un nouveau mois. En effet, chaque Roch ‘Hodech est porteur d’une double signification : un message commun à tous les Roch ‘Hodech (qui est la raison pour laquelle nous mentionnons dans la lecture de la Torah et dans la prière de Moussaf de chaque Roch ‘Hodech le même sacrifice : « Et lors de vos néoménies, vous offrirez un holocauste à l’É-ternel » (Nombres 28, 11)) et un message spécifique à chaque mois (selon son nom, les fêtes qu’il recèle, et d’autres paramètres).

Dans les lignes qui suivent, nous allons expliquer la qualité particulière du Roch ‘Hodech Kislev, tant du point de vue de la signification générale de Roch ‘Hodech que de celui de son message particulier, ainsi qu’en regard de la finalité essentielle de tous les Juifs dans toutes les générations : amener aux jours du Machia’h, en particulier à l’heure actuelle, quand il ne reste plus qu’à l’accueillir.

Le sens général du Roch ‘Hodech est le renouvellement (« ‘hodech » vient de « ‘hadach », «nouveau »), la renaissance de la Lune après qu’elle ait achevé de décroître jusqu’à disparaître totalement. Et bien qu’elle n’apparaisse en cet instant que comme un point lumineux, elle inclut déjà toute son évolution ultérieure, de même que la naissance de l’homme porte en elle toute sa vie. Cet instant est donc appelé « la tête (du mois) », car il est comme la tête qui inclut en elle tout le corps.

Or, la Torah compare le peuple juif à la Lune (voir Talmud Souccah 29a ; Midrache Béréchit Rabba chap. 6 § 3, et autres.), et, comme celle-ci, il se renouvelle à chaque Roch ‘Hodech.

En effet, le Roch ‘Hodech est le moment où se révèle dans l’âme de chaque Juif l’étincelle de Machia’h qu’elle contient, le niveau de « Yé’hida », qui est une parcelle de l’âme du Machia’h (la « Yé’hida » collective du peuple juif). En imprégnant toute les facettes de la personnalité du Juif avec la profondeur de la Yé’hida, cette révélation engendre un renouveau de tout son être, ce qui entraîne la révélation et la venue du Machia’h.

Roch ‘Hodech Kislev

Cette thématique générale de Roch ‘Hodech est puissamment exprimée dans le sujet particulier du Roch ‘Hodech du mois de Kislev.

En effet, le nom « Kislev » se décompose en deux mots, «kes» et «lev ». Le premier, « Kes », représente la dissimulation (« Kissouï ») de la Lune et le second, « lev », représente sa révélation qui suit immédiatement, ainsi que le fait que cet instant précis contient en lui le détail de tous les évènements qui vont en découler. En effet, « lev » a pour valeur numérique 36, ce qui représente l’ensemble des possibilités du caractère humain. Il s’agit des six attributs émotionnels (les six « midoth » : ‘hessed, guévourah, tiféret, netsa’h, hod, yessod) qui se déclinent chacun selon ces six modalités (du fait que chaque attribut inclut en soi l’ensemble des six), soit 6 X 6 = 36 déclinaisons. Le nom de « Kislev » montre donc comment ce mois est lié à la Délivrance messianique, en mettant l’accent sur le « renouveau » du peuple juif lors de la Rédemption (auquel fait allusion le sujet de Roch ‘Hodech).

On retrouve le thème messianique également dans les fêtes du mois de Kislev : la fête de ‘Hannoucah qui célèbre la restauration du Temple de Jérusalem à l’époque des Hasmonéens évoque l’inauguration du futur troisième Temple ; ses huit jours et ses huit lumières évoquent le dépassement des limites du cycle naturel représenté par les sept jours de la Création et les sept lumières de la Ménorah (le candélabre du Temple). Le 19 et le 10 Kislev sont les célébrations liées à la révélation de la ‘Hassidout, la profondeur de la Torah, dont la diffusion est la clé de l’avènement messianique.

En outre, la pratique se répand de plus en plus au sein du peuple juif d’appeler le mois de Kislev, « ‘Hodech Haguéoula - le mois de la Délivrance » et ce, dès Roch ‘Hodech, qui est ainsi « Roch ‘Hodech chel Guéoula – un Roch ‘Hodech de Délivrance » (voir Midrache Chémot Rabba chap. 15, § 11).

Pourquoi seulement le début ?

Il faut néanmoins comprendre pourquoi c’est précisément la renaissance de la Lune qui évoque la Délivrance messianique et non le moment de la « pleine lune ». Nos Sages ont en effet enseigné que l’âge d’or de l’Histoire juive, au temps du roi Salomon et du premier Temple, fut comparable à la pleine lune : de la même façon qu’il faut quinze jours pour que la Lune soit pleine, il a fallu quinze générations depuis Avraham notre père jusqu’à Salomon pour atteindre cette plénitude. Or, sachant que l’ère messianique sera marquée par une perfection encore plus poussée, il semble plus logique de la comparer à une situation de « pleine lune », quand celle-ci brille de toute sa lumière, plutôt que de « nouvelle lune », dans laquelle on commence à peine à en percevoir l’éclat.

Cette apparente incohérence nous mène à conclure qu’il existe une qualité, un avantage inhérent à la « nouvelle lune » qui ne se trouve pas dans la situation de « pleine lune ». C’est cette qualité qui se révélera au sein du peuple juif lors de la Délivrance messianique et c’est pourquoi celle-ci est précisément comparée à la « (re)naissance » de la Lune.

Prier comme un petit enfant

Pour comprendre la nature de cette qualité, il est utile de se pencher sur la notion de naissance et de renouveau telle qu’elle apparaît au sein du peuple juif lors de la naissance d’un enfant :

Du fait qu’il est proche de sa naissance, un petit enfant possède en effet une supériorité par rapport à une « grande personne ». Un Juif adulte est conscient qu’il existe différents degrés chez le Créateur : D-ieu est appelé « Sage », « Tout-puissant », etc. Et même lorsqu’il envisage D-ieu tel qu’Il existe au-delà de toutes ces qualités, la grandeur de D-ieu réside à ses yeux dans le fait de dépasser lesdites qualités et se mesure donc à leur aune.

D’un autre côté, l’enfant, qui ignore ces subtilités théologiques, prie D-ieu en toute simplicité. Il s’adresse tout simplement à « D-ieu Lui-même », dont il n’est pas nécessaire de préciser les « qualités ». Et pour cette raison l’enfant appelle D-ieu « Hachem », « le Nom ».

Cette différence est également illustrée dans la façon dont l’homme s’attache à D-ieu : l’adulte, qui sait que D-ieu dépasse toutes les qualités, l’appréhende de façon « négative », en ressentant que Sa grandeur de D-ieu est de ne pas être limité par ces définitions. Son attachement à D-ieu passe donc par la négation de soi, de ses conceptions, etc ; à l’inverse, pour l’enfant, c’est à travers la perception de soi qu’il est en contact avec D-ieu, car il Le ressent dans toute chose. D-ieu l’accompagne à chaque instant de son existence, dans son repas, dans ses activités, etc.

En d’autres termes, l’adulte s’attache à D-ieu à travers ses propres facultés révélées, son intelligence, sa sensibilité, etc. Et même lorsqu’il s’élève jusqu’à se lier à D-ieu avec les parties les plus profondes de son être, sa force de volonté, de désir, jusqu’à sa « yé’hida » elle-même, cela demeure dans un projet de sortir de soi pour s’unir avec le Créateur. Le petit enfant, lui, s’unit à D-ieu de par l’essence de son âme (qui est au-delà de tout nom/définition que l’on peut donner à l’âme, de toute « qualité » que l’on peut reconnaître à celle-ci).

Avant le « Modé ani »

Ces deux degrés, celui de « l’adulte » comme celui de « l’enfant », se retrouvent dans la vie quotidienne de chaque Juif : Le début de la journée d’un Juif, immédiatement dès son réveil, est marqué par la récitation du « Modé ani » (l’expression de reconnaissance à D-ieu pour la restitution de son âme). Dans cette phrase, on mentionne l’action de reconnaissance (le verbe « Modé ») avant de mentionner sa propre existence (le pronom personnel « ani - je »).

Cette attitude d’effacement total de soi devant D-ieu est l’expression de l’essence de l’âme (au-delà du ressenti de celle-ci). C’est la raison pour laquelle le mot «modé» à la valeur numérique du mot « hèn » (55) qui fait référence à l’Essence du Créateur, au-delà de tous les degrés du Divin (Deutéronome 10, 14), ce mot précède les différentes appellations et nivellements de la Divinité) avec laquelle est liée l’essence de l’âme d’un Juif.

Et la révélation de cette essence de l’âme est liée avec le moment même du réveil. En effet, la récitation du « Modé ani » est en elle-même une démarche (une parole, qui est en soi un acte, et qui implique une pensée) d’humilité, donc de sortie de soi. D’un autre côté, l’instant du réveil (lors duquel on est une « nouvelle créature », comme un enfant qui vient de naître) marque la révélation de l’essence de l’âme dans toute sa vérité. Il n’y a, dans cet instant, rien d’autre que la révélation de son existence. Et comme l’essence du Juif est de ne faire qu’un avec l’Essence Divine, il y a donc dans cet instant la révélation de l’Essence Divine telle qu’Elle se trouve en lui.

Et cette révélation de l’essence de son âme au réveil constitue la base sur laquelle le Juif va servir D-ieu tout au long de la journée, à commencer par la récitation du « Modé ani », puis de la prière disant « l’âme que Tu as mise en moi est pure, Tu l’as créée, Tu l’as formée, Tu me l’as insufflée » qui fait allusion aux quatre autres niveaux de l’âme, et jusqu’à agir au sein le monde dans le cadre de sa profession, etc.

La lumière est une conséquence du dévoilement de l’essence Nous pouvons maintenant comprendre pourquoi la Délivrance messianique est liée à la (re)naissance de la Lune plutôt qu’à la pleine lune : La plénitude atteinte par la Lune le quinzième jour du mois ne concerne que sa lumière, alors que l’existence même de la Lune est révélée le jour du Roch ‘Hodech, lorsque, après avoir totalement disparu, elle surgit de nouveau. Par la suite, cette existence pénètre elle-même la lumière de la Lune.

C’est de cette même façon que se déroulera la Délivrance : les Enfants d’Israël sont amenés à « se renouveler comme la Lune » (comme le dit la prière de la sanctification de la Lune) lors de l’avènement messianique par la révélation de l’essence de leur existence, l’essence de leur âme, qui imprégnera toutes les dimensions de la vie, jusqu’à révéler concrètement aux yeux de tous qu’ils ne font qu’un avec l’Essence Divine.

C’est pour cela que la Délivrance est liée à Roch ‘Hodech, et en particulier à Roch ‘Hodech Kislev, car dans le mot « Kislev » apparaît de quelle façon l’existence même de la Lune, qui se révèle immédiatement après sa dissimulation (« kes »), contient en elle et imprègne toutes les dimensions qui suivent (« lev ») : l’essence pénètre les facultés révélées.

De la même manière, les fêtes du mois de Kislev, liées à la révélation des profondeurs de la Torah, expriment la réunion de l’essence avec les forces (intellectuelles) révélées, car c’est en étudiant cette partie de la Torah que l’on parvient à la connaissance de D-ieu, de l’Essence Divine, en préparation et en avant-goût de l’ère messianique.
Révéler l’essence de l’âme.

Étant donné que la Délivrance résultera de nos actions en exil, il est clair qu’il faut s’y préparer en s’employant dès maintenant à la révélation de l’essence de son âme, telle qu’elle dépasse même le degré de « yé’hida » :
En plus de ce qui a été dit à plusieurs reprises, à savoir que la Délivrance se fera par le fait que chaque Juif révélera l’étincelle du Machia’h qui est en lui, son niveau de « yé’hida », il faut ajouter et préciser que l’objectif essentiel est de révéler l’essence de son âme véritablement, le véritable sujet du Machia’h, l’essence d’Israël qui
dépasse même la yé’hida.

Tel est le sens du verset « J’ai trouvé mon serviteur David, Je l’ai oint de mon huile sainte » (Psaumes, 89) : « J’ai trouvé » fait référence à l’existence même du Machia’h et « Je l’ai oint de mon huile sainte » enseigne que cela doit pénétrer toutes les dimensions, comme l’huile qui s’infiltre dans tous les matériaux.

Cela signifie pour chaque Juif qu’à son réveil, avant même d’exprimer sa yé’hida en se vouant entièrement au service de D-ieu, il ressent son existence, c’est-à-dire l’essence de son âme. Et la prise de conscience de cela (son « réveil ») entraîne à sa suite tous les sujets du service de D-ieu qui jalonnent la journée, en les imprégnant de la révélation de l’essence de l’âme. Tel est véritablement le sujet de la venue du Machia’h : la révélation effective de l’essence du peuple juif.

Tous les jours de ta vie : amener à l’ère messianique

Telle est également la signification de l’injonction de la Michna, « Tous les jours de ta vie, pour amener les jours du Machia’h » : à chaque instant que l’homme est envie et qu’il respire, il a le devoir de faire venir le Machia’h.

Au-delà de toutes les actions qu’il entreprend en ce sens, l’essence même de son existence est de faire venir le Machia’h ! Et cela amènera « les jours du Machia’h », au pluriel, ce qui fait allusion aux deux périodes de l’ère messianique ainsi qu’aux innombrables élévations successives qui la caractériseront.

Ainsi, dès l’instant de son réveil, au moment de la révélation de l’essence de son âme, un Juif ressent en respirant le sujet du Machia’h : l’air du Machia’h. « L’air du Machia’h » représente l’existence même du Machia’h, la révélation de son existence en tant que Machia’h, suite à laquelle commencera sa révélation aux yeux de tous à travers ses actions (« la lumière du Machia’h »).

Ainsi donc, le fait de dévoiler la nature profonde de « ta vie » amène automatiquement « les jours du Machia’h », car ceux-ci sont inclus dans le dévoilement de l’existence de ce dernier.

Concrètement

Après qu’il y a eu la nouvelle lune le jour de Roch ‘Hodech Kislev (« Roch ‘Hodech de Guéoula ») qui est le troisième mois (lié à la troisième Délivrance et au troisième Temple), chaque Juif doit redoubler d’efforts dans le sujet de « Tous les jours de ta vie, pour amener les jours du Machia’h » par le fait que tout son être soit pénétré par la vitalité du sujet du Machia’h. Et il est possible de faire cela à chaque instant, en réveillant l’essence de son âme et en rajoutant encore une bonne action pour faire pencher la balance universelle du côté du bien et amener la Délivrance.

Il ne s’agit pas nécessairement de rajouter dans l’étude de sujets très profonds dans la ‘Hassidout, mais même d’agir dans le domaine matériel par des gestes simples, liés à l’existence même du Juif, comme prodiguer ses besoins alimentaires, en particulier au mois de Kislev, en lui permettant d’améliorer les repas de fête de ‘Hanoucah, et dans le cadre des « Maot ‘Hanoucah » (l’argent qu’il est coutume de distribuer à ‘Hanoucah), et les jours du 19 et du 10 Kislev, on rajoutera dans les repas et les Farbrengens.

Et l’essentiel et que, à travers cela, vienne la Délivrance par l’action du Machia’h. Il est fait allusion à cela dans la conclusion de la haftara de la semaine dernière et le début de la paracha de cette semaine : la haftara s’est terminée la semaine dernière par la proclamation « Yé’hi Adoni Hamelekh David Léolam - Vive mon maître, le roi David, pour toujours ! » (I Rois, 1, 31). Celle-ci exprime le dévoilement de l’existence même du Machia’h. Et grâce à cela et à la suite de cela, vient son dévoilement aux yeux de tous par ses actions pour délivrer le peuple juif, comme cela transparaît du début de la paracha, « Vééleh Toldot Its’hak – Voici les engendrements de Its’hak ».

Cela signifie que la « naissance » (« Toldot ») du Machia’h entraîne son dévoilement (« Vééleh - voici ») jusqu’à ce que cela provoque le rire et la joie dans le monde (« Its’hak »), y compris auprès des Nations (comme cela transparaît des Parachioth suivantes, Vayétsé et Vayichla’h) - immédiatement.

Pour toute remarque, suggestion ou question : leditroyal@yahoo.com

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